O.Q.N.I. (Objets du Quotidien Non Identifiables)

C’est dans l’état d’esprit de mettre en volume une vision simple sur papier, comme le collage de deux formes similaires, que les O.Q.N.I. (Objets du Quotidien Non Identifiables) ont été conçus. En constatant, lors d’expérimentations de collages papiers, que la plupart des formes manufacturées, dédoublées symétriquement, pouvaient faire penser à des OVNI, Jeanne Cardinal choisi de creuser plus avant ces réflexions sur la reconnaissance et le potentiel d’évocation des objets manufacturés.

Moulés et coulés en béton, c’est l’essence même des objets, qui se trouve modifiée. L’artiste met à l’épreuve nos mécanismes de cognition en nous invitant à reconnaître la facture de ces objets, tandis que l’emploi du béton pour les représenter brouille les pistes. Celui-ci confère aux volumes une apparence fossile qui contredit la modernité avérée de leur design. Venir à leur rencontre implique un réel effort de compréhension, d’autant qu’ils sont porteurs d’une énergie très différente de celle de leurs objets de référence, qui sont en plastique. Les Objets du Quotidien Non Identifiables sont des interprétations d’objets banals issus de la société de consommation. De par le décalage subi, une distorsion du sens apparaît, qui remet en cause leur nature et leur rôle au sein de celle-ci.

Les O.Q.N.I. sont les moulages des espaces vides se trouvant à l’intérieur de leurs objets de référence. En matérialisant ces espaces ils rendent ainsi l’invisible visible. Pleins et unifiés par la matière, les volumes sont disposés sur un lit de quartz diffus, dont ils se détachent avec une légèreté inattendue. Leur caractère double impose de les présenter au sol, dans un placement peu convenu, lequel accroît encore l’énigme de leur existence. Ainsi montrées, ces sculptures pourraient être pour le visiteur - orienté par le titre de l’oeuvre - l’occasion de porter un regard de biais sur sa réalité quotidienne.