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Commun des mortels

1993-1995
Série de vingt triptyques verticaux

Tirages couleur plastifiés mats
Tirages contrecollés sur PVC
Cadre aluminium sans verre, 50 x 150 cm chaque triptyque

« Je photographie la réalité, celle du dehors et celle du dedans, confrontés. Je suis photographe. J’associe des événements du monde — la naissance d’un veau, la mort d’un rat, la beauté d’un paysage, la fatalité d’un incendie — à des rituels humains mis en scène et qui questionnent nos destinées. Mes images ne sont pas manipulées : je pars d’une matière réelle, d’une prise de vue qui, confrontée à ma perception, à ma conscience, dévoile ce qu’aucune objectivité ne peut obtenir : un sens qui, pour moi, est essentiellement de nature poétique. Il ne peut y avoir de sens global de l’existence. Je m’efforce depuis toujours de trouver le mien, de trouver ce qui fait sens et d’accepter en toute connaissance, la dimension parfois tragique, parfois lumineuse de la vie. »

Florence Chevallier, 1996

« Un rat crevé, un nouveau né, un tas de branchages. Le visage d’une femme, le soleil derrière les nuages, une vache. L’animal, l’humain et la nature forment ensemble la communauté des mortels. Malgré leur profonde différence, l’être instinctif, l’être doué de conscience et l’être végétatif partagent le même destin : la destruction, le pourrissement, la disparition, l’oubli. La vie porte en son sein le souffle de la mort. Et cette tragédie est d’une effroyable banalité ; le cycle des naissances et des morts est ininterrompu, aussi normal et monotone que la succession des saisons, des jours et des nuits. Dans les triptyques de Florence Chevallier, le temps qui passe est rythmé par la lente pulsation de la vie qui suspend sa course, si lente que tout se fige, dans le silence d’une immense solitude. »

Paul Demare, catalogue Esthétiques de l’ordinaire, Mai de la photographie , Reims, 1995

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“ On dirait que tu as adopté un principe d’isolation du motif ou de la figure afin de conjurer tout caractère figuratif, illustratif voire narratif, tout lien logique entre le sujet et sa situation, son contexte de référence ( ce qu’il aurait obligatoirement s’il n’était pas isolé).
Je trouve que dans cette série Communs des Mortels la photographie n’a pas d’histoire à raconter, ni de situations à décrire , de même qu’elle n’a pas à témoigner d’un “ça a été”.
Ce travail témoigne davantage d’une réalité psychique que de quelque chose de concret...à mon avis la seule histoire dont il est question ici, c’est celle du montage de souvenirs fragmentés associés à des expériences sensorielles, reliés à des scénarios fantasmatiques et à des images phobiques.
Tu nous montres une méthode d’association des images qui correspond à la pensée imageante qui a beaucoup à voir avec la pensée onirique.....
En résumé , il me semble que tu te débarrasses des liens “ horizontaux” que chaque photo entretient avec son contexte de référence, c’est à dire les connexions narratives, descriptives, logiques, pour leur substituer des associations “verticales” entre ordres hétérogènes: la nature, l’animal, l’humain; associations qui ne sont pas régies par la pensée logique,rationnelle,mais dont la loi réside dans la pensée inconsciente de chaque être. ...
Les procédés utilisés sont ceux de l’isolement, de la fragmentation, de la coupure et du montage. Je trouve qu’il y a une dimension dialectique dans le montage au sens où c’est le choc des hétérogènes qui donne la mesure commune.
Par cette opération tu essaies de faire affleurer le monde intérieur de chaque être, sa réalité intime, ses émotions, ses ressentis plus ou moins réprimés qui peuvent advenir chez chaque spectateur de Commun des Mortels....

Pierre OLIVIER 2005

Vue de l'exposition Commun des Mortels, Les Philosophes, Galerie Les filles du calvaire, Paris, 1998

© Adagp, Paris