Présentation d’Alain Goulesque vernissage QAQ
Cher Rémi,
J’ai pris beaucoup de plaisir à construire avec toi cette installation
Quels ailleurs quel. Depuis 7 ans déjà, nous avons pris comme principe de ne concevoir que des expositions inédites, créées en collaboration avec les artistes. Ce fut le cas encore une fois avec toi et le résultat me semble particulièrement juste et correspondre à ton projet : justesse du propos, justesse des dialogues entre les formes, les espaces, entre tous les médiums que tu utilises : photos, dessins, sculptures, frottages, vidéos et bien sûr son ; justesse également du regard et de l’engagement que doit avoir l’artiste face à ce qu’il observe. Cette exposition-installation est politique, engagée, autant par le sujet qu’elle travaille que par le fort investissement de son auteur : souviens-toi le nombre de questionnements posés durant nos 3 semaines d’installation.
Alors dans ces cas-là, je rejoins les interrogations inscrites en blanc sur fond noir par Ben sur le mur des mots dans la cour du doute, car elles accompagnent toute création et tout créateur qui « s’engage ».
Comment faire pour :
« Eviter le talent
Eviter la variation
Eviter l’astuce
Eviter le superflu
Eviter la décoration,
Bref, si seulement je pouvais tout éviter »
Il faudrait rajouter pour ce qui concerne son exposition : comment éviter d’être l’ethnologue de ses découvertes, le documentariste de ses explorations ou l’aventurier de retour des îles ? Tant de questions et pas mal de difficultés … puisqu’ici nous parlons d’art, de la vision artistique d’un monde en question, dont l’avenir se jouera à l’issue d’un référendum sur l’indépendance de la Nouvelle Calédonie.
Artistique parce que poétique ; il est clair, pour moi, que tu construis, envisage, organise et conçois un « écart » entre forme et fond, écart qui caractérise justement toute production artistique, écart dans lequel se jouent détournements, inventions, mutations et fabrications d’images inattendues par rapport au sujet. Ce que nous avons réussi, me semble t-il, dans cette installation, c’est ce qui ressort de ton choix de décaler, multiplier les points de vue, les cadrages, les circulations autour des sujets …
Bref, je ne sais pas si tu es réellement un « artiste-presque », comme le dit Yann Pérol dans le texte qui accompagne le document de visite, mais si c’est le cas (et nous en sommes « presque » persuadés), tu rejoins ainsi la famille de tous les « artistes-presque » qui font la richesse de notre Fondation du doute, Ben Patterson, Geoffrey Hendicks et tous les artistes Fluxus qui ont continuellement désigné, comme toi, ce que l’on ne voit pas, décrit ce qui est là d’une manière inattendue. Chez toi comme pour eux, les mots renvoient à un « réalisme magique » qui opère à tout moment, en toute situation, et de façon ludique.
Alors bien sûr « artiste presque » mais comme on dit aujourd’hui, « pas que »,
« Artiste presque ailleurs », assurément.
Présentation d’Alain Goulesque vernissage QAQ 4 mars 2020